Séminaire
Artistes
en milieu scolaire
À la demande d'artistes intervenant en milieu scolaire, le GRETE, qui a déjà travaillé sur le partenariat Éducation Nationale / Culture (cf dossier GRETE), a organisé des rencontres en direction des intervenants des ateliers de pratique artistique et des options.
Il s'agissait:
- d'ouvrir un espace de parole pour les artistes,
- de constituer un groupe pour que les informations circulent entre eux,
- de clarifier des axes de travail qu’ils mènent ,
- de questionner le théâtre en milieu scolaire,
- de définir et de mieux situer le rôle et la place de l'artiste à l'école,
- de rendre visible tout le travail effectué,
- de constituer une force de réflexion et de proposition
Différents sujets ont été évoqués lors des séances tenues à la Maison des Associations - Marseille :
- «la confrontation des pratiques»
- «l’artiste et le travail artistique à l’école»
- «les objectifs - le partenariat»
- «intérieur/extérieur, ou l’intervenant entre l’art, l’école et la cité»
Les intervenants ont déterminé des axes de travail à partir desquels le GRETE les a invité à écrire un texte pour présenter leur démarche personnelle d’intervenant-théâtre en milieu scolaire en partant de ce qu’ils font réellement, autour des thèmes suivants :
- motivations et objectifs
- comment et pourquoi ? démarche artistique (?). formation du spectateur (?).
- repères et méthodes
- statut, relations aux élèves, aux enseignants, aux projets, aux structures théâtrales, aux institutions et à la cité.
Ils ont envisagé plusieurs possibilités pour poursuivre leurs échanges : études de cas, stages, colloque, journal, charte.
Lors de la réunion de rentrée et suite au dépouillement des souhaits des intervenants le GRETE propose de poursuivre la réflexion et qu’une contribution spécifique du groupe des intervenants puisse avoir lieu lors du colloque que le GRETE organise sur le thème «Théâtre, Art, École et Société». Montage de textes théoriques et personnels avec interventions lors du colloque. Ce qui fut fait.
Il a été décidé un chantier commun aux intervenants de théâtre et aux enseignants du GRETE pour que l’art vive dans l’école sous forme d’un stage conjoint; thème de travail : "Échange sur les pratiques et comment approcher le théâtre contemporain avec des élèves”.
Ce stage de quatre jours en présence d’auteurs en particulier Jean Marie Piemme s’est organisé à la Chartreuse autour de moments de lecture, d’ateliers de pratique théâtrale , de rencontres et de débats sur des thèmes de travail en partenariat.
D'autre part les artistes intervenants ont demandé que le Grete intervienne auprès de la Drac pour qu'ils puissent exister et exposer leurs préoccupations vis à vis des structures culturelles qui font leur font appel pour les interventions en milieu scolaire et refusent d' accueillir leurs créations. Ce qui fut fait.
Un colloque a eu lieu sur l'apport de l'artiste.
COMPTE RENDU DE LA COMMISSION
Ce compte rendu réalisé à partir des témoignages , débats et écrits des personnes intervenant en théâtre dans les ateliers et options, en partenariat Éducation Nationale/Culture, qui ont participé à la commission “intervenants” et qui représentent une large majorité des ateliers est tout à fait représentatif.
* Il s’agit presque à 100 % d’intermittents du spectacle, peu de permanents donc.
* Ce travail fait avec les élèves, il le considère tous comme « artistique »; il est donc à terme mis en question puisque les ASSEDIC, eux, ne le considère pas comme tel.
La plupart interviennent dans les ateliers de pratique artistique, les options théâtre qui ont deux épreuves et coefficient 6 au bac les questionnent sur leur statut : «avec le programme je suis en situation d’enseignant, je fais de la pédagogie artistique» dit l’un; «ça m’enrichit de devenir pédagogue, de théoriser ma pratique» dit l’autre - ce qui prouve bien que l’enseignement du théâtre est différent de la démarche de l’atelier où l’artiste se retrouve dans ce qu’il sait faire.
* Comment se nomment-ils eux-mêmes ?
50 % Artiste, sinon Artiste/Intervenant, Artiste/Animateur, Artiste dramatique, Passeuse de théâtre et rarement Animateur ou Artiste indépendant, car la plupart (80 %) appartiennent à une compagnie où ils jouent et seulement 20 % se considèrent prestataires de service pour la structure théâtrale qui les embauche et qui, souvent, n'invite pas leur création qu'il déconsidère ainsi.
Cette question de l’artiste paraît d'autant plus aiguë, pour le milieu scolaire, que les institutions culturelles privilégient désormais les lieux plutôt que les compagnies, pour simplifier la gestion culturelle; et d'autre part, les DRAC, avec les nouvelles dispositions sur les compagnies, ne financeront plus leur fonctionnement mais seulement le projet de création, lorsqu'elles ne sont pas en convention, ce qui représente à peu près la totalité des compagnies intervenant en milieu scolaire; il y a donc danger : les artistes qui se sont investis ces dix dernières années dans le milieu scolaire dans notre région en même temps que dans leur création professionnelle le pourront-ils encore demain ? Et les artistes en résidence dans les théâtres pourront-ils assurer un travail artistique ou l'ère du culturel est-elle totalement triomphante ?
Le GRETE, après accord des participants qui ont longuement écrit sur ces questions, propose des extraits qu'il a choisis, non pas de manière exhaustive, mais pour faire entendre des paroles personnelles qui soulèvent ainsi dans leur juxtaposition de nouveaux questionnements.
Un journal spécial sur ce thème a été distribué (Bulletin N° 25 du Grete).
POINTS DE VUE D’ARTISTES INTERVENANT
"Être artiste est une attitude".
Une réaction au monde qui nous entoure, comme le délire du malade mental.
Une tentative de réappropriation théorique ou poétique du monde.
Dans le meilleur des cas, elle retrouve le chemin du corpus social et s'y insère.
L'artiste peut alors vivre, subsister de sa production, la légitimité de sa poétique devient admise, reconnue . Encore une fois, dans le meilleur des cas.
Faire du théâtre en 1998, est-ce être encore un artiste ?
L'instrumentalisation de notre société a fait du théâtre (encore plus que pour les autres Arts) avant tout une pratique.
Pratique de plus en plus réglementée, inspectée, instituée, normalisée, inscrite dans le temps et l'espace. Jamais nous n'avons autant entendu le mot de “ professionnel “. Les écoles d'acteurs prospèrent.
Je ferai toujours pour ma part un distinguo hiérarchique entre les artistes interprètes et ceux/celles porteur/ses de cette urgence vitale de produire du sens (auteurs, metteurs en scène, etc... et encore pas tous).
« Il ne nous reste qu'une ressource face à la mort: faire de l'Art avant elle » René Char.
Être artiste est, pour moi, une tentative de réponse à mon mal être, ma peur, mon angoisse d'être au monde, d'être de ce monde.
Et puis par la suite s'est rajoutée la sauce pour m'accommoder de ce monde. Il faut de l'argent: j'en trouve; il faut séduire: je séduis - sans morale. Règle du jeu sociale à laquelle je ne peux mais.
Alors qu'est-ce que je fous dans des ateliers/théâtre ?
On est venu me chercher, primo. Sans doute, n'y aurais-je jamais pensé seul.
Ensuite j'ai découvert là une parenthèse heureuse de rapports. Enfin un lieu dans l’École où l'on parle: plaisir, jeu, désir, amour, corps.
Où sont bannis, ou du moins le fais-je les notions de résultats, de sanction, de l'échec, de performance.
Je tente de faire de la maïeutique, car faire comprendre à un individu que 10 minutes de sa vie peuvent être aussi importante qu'une tragédie de Shakespeare reste un objectif illusoire, sans doute, mais séduisant.
Je fais avant tout jouer. And “to play is to play” comme le disait Peter Brook.
L'interprétation théâtrale est un art d'épure. Certes, il y a les techniques (voix, espace, corps) mais ce ne sont que des techniques, c'est l'instrumentalisation dont je parlais plus haut qui les a sacralisé, comme fin en soi.
J'essaie de faire atteindre l'émotion, l’Être.
Le spectacle, ou la présentation du travail n'est que le prétexte à une mise en danger, certes orchestrée, mais dont le but reste la découverte de soi.
Je suis, dans le sein d'un atelier, “l’autre“, ne dépendant pas de l’Éducation Nationale, le chargé de l'extérieur. L'incongru.(...) Mes rapports avec l'institution scolaire ?
Dans le meilleur des cas, les professeurs nous témoignent une gentille condescendance. Je parle des collègues de nos «partenaires». Les chefs d'établissement sont souvent plus paradoxalement bienveillants. Mais j'ai bien souvent peur qu'une rentabilité à court terme de l'épanouissement (relatif) des élèves soit leur principal centre d'intérêt. Il faudrait aussi parler du peu de considération de la plupart des parents qui n'hésitent pas à sacrifier le “théâtre” à des rendez-vous médicaux, des départs en week-end, etc...
Ce qui me fait tenir ?
Vivre avec les participants des ateliers des instants stimulants, magiques. Car il est plaisant de jouer.
Voilà, tout à trac, un ensemble de réflexions. Rien n'y est, tout y est.
(Bernard PALMl - 28 Juin 98)
MOTIVATIONS ET OBJECTIFS
Les motivations et objectifs des intervenants mettent en évidence, à la fois les expériences passées mais surtout le rapport qu'entretient l'artiste à la société.
Les compagnies sont davantage préoccupées par leur implantation dans la cité, et intègrent plus souvent un travail global de proximité en relation avec leur création, dont le milieu scolaire est un élément.
Pour tous, il s'agit de transmission d'une passion, d'un art - dans les discussions, il a été souvent question de refuser les termes de «pratiques» ou «techniques théâtrales» pour affirmer encore plus qu'il s'agit d'un art - et qu'il n'est pas souhaitable d'en faire une approche qui deviendrait de plus en plus culturelle, même dans le milieu scolaire.
L'artiste s'intéresse à la personne et à quel moment doit-il prendre en compte l'élève et ses difficultés scolaires ? Sur ce plan, ils sont divisés.
MOTIVATIONS
«(...) En développant le pouvoir d'imagination et de création de tout individu sans exclusive, nous voulons permettre l'intégration de l'individu dans la société par la formation culturelle et favoriser le pouvoir de discernement et d'adaptabilité nécessaire à l'évolution de la société (...)».
(LA BANDE DU ROY RENÉ)
« (...) Et puis surtout et avant tout... la passion de créer avec eux des images, des espaces, des fictions, du sens, une autre réalité, de leur permettre de prendre la parole et le geste et d’inventer dans le lycée un espace privilégié où les élèves deviendraient des auteurs et les auteurs de leurs désir, de leur vie (...)».
(Jacqueline GARIN - GRETE)
« (...) L'immense plaisir à transmettre, à rencontrer, à chercher, à découvrir, à partager avec des êtres humains, quelques outils permettant d'affiner son matériau (...)»
(Judith ARSENAULT)
Tous les intervenants aimeraient échanger leur travail, se voir les uns les autres. L'envie de faire un stage ensemble c'est aussi pour cela.
OBJECTIFS
« (...) Permettre à l'individu de libérer son imaginaire, sa fantaisie, sa parole au service du jeu théâtral (donc de formes métaphoriques qui scrutent le monde)
Et... l'acquisition d'une certaine autonomie et d'une certaine interdépendance dans un groupe, avec un engagement ludique et poétique (...)»
(Judith ARSENAULT)
« (...) La Compagnie Senna'ga consacre une partie de ses activités à la formation.
C'est un choix, une volonté, une nécessité.
- Pour former des spectateurs avertis.
- Pour former des êtres humains sensibles, réceptifs, ouverts, capables de recevoir et de donner; le théâtre s'inscrivant ici dans un processus de socialisation.
- Pour former des citoyens porteurs d'un regard critique sur le monde, le théâtre agissant ici comme un vase d'expansion et d'ouverture
La compagnie s'adresse à un public très large et souhaite ouvrir de plus en plus sa formation à des populations souvent en marge et exclus des chemins traditionnels de la culture(...)»
(Cie SENNA’GA)
« (...) Les objectifs sont là aussi pour moi de plus en plus reliés à une recherche artistique “personnelle” ou plutôt une mise en œuvre quasi permanente de questionnements artistiques autant pratiques que théoriques, autant réfléchis qu'émotionnels :
1. Faire découvrir en tout lieu, presque en toute durée, quelquefois d'une manière très rapide, quelquefois sur la durée, que le théâtre est d'abord la mise en œuvre d'un regard, d'une écoute «autre »: unir yeux et oreilles autrement (pour le spectateur et pour l'acteur)
2. Faire comprendre ou sentir que la seule spécificité du théâtre (par rapport à d'autres pratiques artistiques) est une présence directe d'un corps qui s'adresse de manière multiple à d'autres selon des codes souvent simples mais spécifiques.
3. Ouvrir, ouvrir, ouvrir des fenêtres sur toutes les «bases» quelquefois oubliées de cette activité ou plutôt de cette expérience :
- “espace” scénographie/décor,
- Temps/moment/durée,
- Parole/écriture/corps,
- Regard, vision/imaginaire/réel/symbolique etc (...)»
(Dominique CHANTE)
« (...) Mon premier objectif a donc été de faire connaître et aimer aux élèves-comédiens ces textes qui pour eux étaient nouveaux. Souvent, j'ai eu des réactions de rejet, (encore aujourd'hui certains élèves me disent que les textes de théâtre contemporain sont hermétiques ou ne les font pas assez rêver parce qu'ils les replacent dans leur quotidien). Ce qu'ils aiment dans le théâtre classique ce sont: les mots, les situations, les dialogues, et les sentiments. Évidemment, tous les élèves ne réagissent pas de la même façon.
Mon deuxième objectif et il rejoint naturellement le premier est d'amener l'élève à se dépasser.
Découvrir ses possibilités c'est aussi mieux s'ouvrir à l'autre. Je n'ai pas peur non plus d'écouter les enseignants avec lesquels je travaille me parler des problèmes de tel ou tel élève, je ne peux pas exclure le milieu dans lequel j'interviens, et là en l'occurence il s'agit du milieu scolaire. En quelque sorte, je ne comprends pas un intervenant qui dirait: « je me fous qu'un élève soit en échec scolaire, ça ne m'intéresse pas ». Sans jouer sur le fait que le théâtre peut aider l'élève à vaincre sa timidité et donc le théâtre deviendrait par là-même une sorte de thérapie, je pense qu'il est nécessaire pour créer un groupe qui fonctionne et être à l'écoute des attentes de l'élève, d'apprendre à le connaître pour l’aider à évoluer. Je ne cherche jamais à faire de la psychologie, ce n'est pas mon rôle mais je ne perds pas de vue le fait que j'interviens dans un établissement scolaire et si le théâtre peut aider un élève à progresser ailleurs je ne suis pas contre, dans ce sens où le théâtre l'a révélé à lui. Ensuite, je ne peux pas savoir aujourd'hui l'impact qu'aura sur lui le théâtre (...).»
(Patricia FIORI)
REPÈRES ET MÉTHODE
Il est plus difficile, tant les influences sont nombreuses, d'expliciter les repères et méthodes.
En tout cas, les expériences, sa formation d'origine, les lectures, les stages, sa relation à l'école sont au centre, mais le projet semble déterminant dans les choix.«(...) Concrètement :
1. préparation préalable, en fonction du groupe: recherche et/ou souvent écriture d'un scénario enthousiasmant;
2. travail corporel et vocal explorant la « biomécanique » (démarche, masques faciaux etc. . . ) et les états intérieurs et leurs gammes expressives - exploration de la notion de personnage;
3. Chacun joue à tour de rôle les différents personnages proposés;
4. Distribution (souvent évaluée ensemble) - répétitions - mise en (échange d'un certain nombre d'éléments).
Les méthodes changent selon les projets proposés et au fil des années.
Beaucoup d'emprunts puisés dans mes expériences de travail théâtral et ajustés selon le propos et le groupe (...)»
(Judith ARSENAULT)
«(...) Constantin Stanislavski pour son travail sur la "formation de l'acteur" et sur la “construction du personnage" ainsi que, Jerzy Grotowsky pour son travail sur le corps et la voix .Ceci concerne le travail technique intérieur et extérieur du comédien.
L'Actor's studio et surtout Lee Strasberg pour le travail psychologique et la réalité esthétique du comédien ainsi que la manifestation individuelle de l'expression.
Alain Knapp pour son travail sur la création et l'imaginaire (Théâtre-Création).
Augusto Boal pour son travail social d'inclusion du vécu dans une création collective Théâtre-Forum).
Maurice Merleau-Ponty pour son travail sur la phénoménologie de la perception et la philosophie du comportement (...)»
(La BANDE DU ROY RENÉ )
« (...)
4.1 Mes propres émotions.
4.2 Beaucoup de lecture théorique : psychologie de l'apprentissage, lectures, logique, philosophie, sciences de la vie
etc...; livres de praticiens/théoriciens du théâtre et enseignement; spectacles que j'aime.
4.3 Repères très forts (parce qu'intégrés à des démarches) acquis en stages (...)»
(Dominique CHANTE)
LES RELATIONS DE L’ARTISTE INTERVENANT
Elles semblent très bonnes avec les élèves, plus difficiles avec les enseignants, mais certains affirment au contraire apprendre beaucoup à leur contact, tandis que d'autres ne savent pas où est leur place, et reprochent aux enseignants de n'être pas assez formés ou trop formés.
Vis à vis des structures théâtrales, les relations semblent franchement mauvaises, revendicatives. Peu d’intervenants participent avec les enseignants à la sortie théâtrale avec les élèves (problème de financement ?) même s'ils en parlent ensuite. Ces deux activités, «faire et voir», semblent assez peu liées dans leur approche. Actuellement, les intervenants s'occupent davantage du faire que du voir et renvoient ce rôle directement aux théâtres.
Quant aux relations avec les institutions, elles semblent absentes : ou elles ont lieu seulement avec les responsables de compagnies de théâtre qui, participant eux-mêmes aux réunions, n' informent pas ou pas assez ceux qui sont sur le terrain.
Pour la cité, les compagnies semblent davantage reliées et souvent de manière correcte.
LES RELATIONS AUX ENSEIGNANTS
« (...) La réponse devrait être longue en prenant le temps d'y répondre...
Globalement, les relations sont authentiques donc plutôt bonnes lorsque les «ondes» se croisent, et délicates et périlleuses à certains moments avec par exemple les enseignants lorsque les choix esthétiques divergent (...)»
(Judith ARSENAULT)
« (...) Les enseignants avec qui je travaille en partenariat sont trop peu “formés” en général et j’ ai souvent la pénible impression d'un décalage que je compense par une affectivité (qui vient souvent d'eux d'ailleurs) réciproque, genre frère/sœur ou sœur/sœur..
Je me sens souvent très pédagogue avec les enseignants et cela est frustrant: j'aimerais être confrontée à des situations plus curieuses où l'enseignant a un bagage théâtral plus consistant: ça m'intéresse quand ça «pulse ».
Nous travaillons en duo (2 intervenants) et duo enseignants (...)»
(Dominique CHANTE)
« (...) Je voudrais à présent aborder le problème du partenariat ou comment partager avec un enseignant un atelier-théâtre ?
Quand il s'agit de gérer et d'organiser un atelier seule c'est simple, mais quand nous sommes 2, forcément ça se complique car les élèves ont besoin d'un centre, il faut donc être en harmonie avec l'enseignant et vice-versa ce qui n’est pas sans difficulté.
Le premier point qui fait obstacle est de savoir à quel moment c'est moi, en tant qu'artiste-intervenant qui doit m'exprimer, à quel moment c'est l'enseignant qui doit intervenir. Je pense qu'il faut beaucoup de discussions autour de l'atelier et de nos objectifs. Une fois que nous nous sommes entendus sur les objectifs, il faut aussi parler du contenu. .
Avec l'enseignant nous n'avons pas toujours le même rapport avec les élèves. Alors, il est vrai qu'à un moment, j'ai eu peur de fonctionner dans le compromis: si nous devons discuter de nos choix de textes, des méthodes utilisées, il devient difficile de s'affirmer et de s'épanouir (pour l'enseignant et l'intervenant). Il faut que la rencontre se fasse entre nous, mais il faut aussi que les rôles ne soient pas les mêmes, selon si c'est l'intervenant ou l'enseignant qui agit. Pour l'atelier qui me concerne, nous avons avec l'enseignante des rôles bien définis et nous intervenons avec beaucoup de précision dans tel ou tel acte que nous avons choisi (...)»
(Patricia FIORI)
RELATIONS AUX STRUCTURES THÉÂTRALES
« (...) Les structures théâtrales n'ont pas du tout l'habitude de nous faire participer vraiment aux décisions, encore moins de nous demander notre façon de voir: on se sent souvent alors «prestataires de services” et c'est un sentiment très pénible surtout quand on les voit par ailleurs récupérer les effets bénéfiques de ce travail.
Bref, pour moi, c'est vraiment pas sérieux et c'est à revoir de fond en comble - sans oublier non plus que, manifestement, les Compagnies qui interviennent en milieu scolaire sont précisément (sans doute) celles dont on ne reconnaît pas les démarches artistiques: d’'un côté les grands créateurs, de l'autre les fantassins du terrain. Absurde découpage qui coûte très cher en énergie, en réunions, en bla-bla et en mauvais fonctionnement (...)»
(Dominique CHANTE)
«(...) Ces relations sont un apport intéressant à la formation du spectateur (cf § 2-3-) par les spectacles vus et les rencontres qu'ils engendrent avec les comédiens et le metteur en scène. Toutefois nous souhaiterions approfondir ces relations en suivant l'évolution d'une création d'une troupe en résidence (...)
(Bande du Roy René)
RELATION À L'INSTITUTION
Quant aux relations avec les institutions, elles semblent absentes : ou elles ont lieu seulement avec les responsables de compagnies de théâtre qui, participant eux-mêmes aux réunions, n' informent pas ou pas assez ceux qui sont sur le terrain.
Pour la cité, les compagnies semblent davantage reliées et souvent de manière correcte.
« (...) Nous n'avons avec les institutions que des rapports de «dossiers» et c'est là aussi une coupure formidable : je m'étonne toujours de l'absence des institutions (qui pourtant nous ont financé) dans nos activités réelles Théâtre/Éducation et autres ateliers: c'est donc par confiance quasi-aveugle ou fonctionnarisation ou négligence que nous œuvrons sur ces limites.
« (...) Conclusion : la plupart de ces structures sont extrêmement embarrassées de fait avec les APA : c'est lourd...
Pour les ateliers et autres c'est une façon pour eux, en fait, de nous “utiliser” pour remplir leur salle et dire qu'ils font un travail de terrain : du point de vue «contenu» c'est souvent très pauvre, aucune réflexion, aucun réel intérêt de fait (sauf exception évidemment !)
Je n'ai pas fait beaucoup de partenariat avec d'autres structures mais pour l'instant mes conclusions sont sévères : ce n'est pour elles qu'un truc institutionnel et cela me semble même les dépasser (individuellement chaque responsable peut tenir un discours d'intention fort remarquable : de fait, ils en arrivent presque tous au même résultat ou ont tendance à être d'abord dans des préoccupations institutionnelles.
C'est un grand questionnement pour moi et j'ai décidé de mener, en partie, ces activités d'une manière séparée avec la Cie : c'est plus direct, plus vrai, plus simple, plus drôle et cela va beaucoup plus loin sans être si lourd. Le problème c'est que la Cie n'a pas du tout les moyens de fonctionnement nécessaires et qu'on fait un boulot tout a fait remarquable sans être remarqué par les structures (...)»
(Dominique CHANTE)
«(...) Il faut dépasser la relation individuelle pour avoir un véritable dialogue avec les institutions (DRAC, Education Nationale, la Santé et les Affaires Sociales) pour les obliger à réellement définir leurs positions face à notre rôle dans la formation de l'individu grâce à des structures comme le GRETE peut-être (...)»
(Bande du Roy René)
La représentation publique reste importante pour la plupart des intervenants, elle justifie même leur rôle d’intermittent faisant une mise en scène; les formes sont diverses, durent plus ou moins longtemps et représentent un acte fondamental du théâtre.
« (- ) La représentation publique en fin de parcours (aussi court soit-il) ce plaisir échangé avec le public, est, outre le bonheur de sentir se concrétiser l'exploré, un moteur important qui permet de stimuler les enfants dans leur travail collectif, pour aller au bout d'eux-mêmes et se tolérer mutuellement (...)»
(Annie RHODE)
« Cette nuit , nous avons appris la peur
nous avons appris le trac
nous avons appris la relation d’un groupe
nous avons appris à aimer la scène
nous avons appris une nouvelle fois à aimer le théâtre
nous avons appris une nouvelle fois à aimer la vie.
..Tous ces instants magiques ont forgés en nous et entre nous des liens ineffaçables. Chaque seconde nous a empli le coeur d’une bouffée de vie
.Cette nuit,la vie était sur scène.
.Nous avons tous rempli notre tête de souvenirs.
J’ai appris cette nuit que le théâtre est un univers magique qui nous ouvre les yeux et ,nous,acteurs nous sommes là pour transmettre cette vision du monde.Aujourd’hui je réalise la chance que j’ai de pouvoir exercer dans ce milieu.Même si cela peut parfois être dur ,je suis heureuse de faire du théâtre car il nous offre des émotions fortes, qui m’a appris des instants de bonheur.
Le théâtre est une source de vie qui m’a permis un épanouissement personnel.Tout en découvrant l’exigence du théâtre j’ai découvert l’exigence de la vie.»
Pour les artistes intervenir en milieu scolaire, même s’il y a des questions à résoudre, est toujours positif , les intervenants qui ont participé au groupe ont une expérience déjà longue de 5 à 15 ans..
« (...) Quels en sont les apports ?
- Le plaisir d'apprendre une passion
- La spontanéité des enfants, leur capacité à rentrer dans le jeu est un stimulant artistique
- La formation est un pied de plus dans la réalité et la société ce qui leste nos vies d'artistes en apesanteur.
-Former un public présent et futur au spectacle vivant
Quelles en sont les réserves, les limites ?
- Celle des horaires scolaires et de la lourdeur administrative
- Les mutations d'enseignants rendent difficile le travail en équipe dans la durée
- Le manque d'importance que porte l'institution à ces pratiques, relativement à d'autres
- Le manque de locaux appropriés (...)»
(Annie RHODE)
L’ATELIER DE PRATIQUE ARTISTIQUE
« (...) Le théâtre à l'école...
Développer une pratique sociale citoyenne du théâtre à l'école c'est partir de l'idée que cette pratique artistique peut et doit jouer le catalyseur à l'autonomie de la pensée de l'enfant.
A l'école, parce que c'est encore le lieu de démocratisation du rapport à la Culture, et à l'art.
Il ne m'est pas attribué la tâche de faire un choix entre L'Art et la Culture mais plutôt de conserver et de donner sens à cet antagonisme, pas de le réduire mais plutôt de travailler à la recherche de démocratie dans son dépassement. L' objectif était que les enfants eux mêmes choisissent le chemin de l'artistique.
Le public des enfants...
Travailler avec des enfants, c'est travailler avec leurs désirs, le mien, et celui du partenaire.
Le tissage, le mélange, le métissage de tous ces désirs sont la structure citoyenne de l'atelier.
Travailler avec eux, sur un texte de théâtre ou pas, c'est travailler à l'émergence d'une autre écriture du monde que celle nous avons pour habitude de regarder tourner. C'est travailler à un autre lien que celui qu'on nous impose, c'est réinventer un lien qui ne repose pas sur le niveau culturel ou la vie sociale de chacun.
Sur un plateau:
Pas de loi mais une règle, lieu de l'acte et conjointement du sens.
On prend conscience de soi autrement que dans la vie, que le temps s'arrête et que vivre n'est pas donné sur un plateau .
Pour l'exigence du jeu, on s'habitue à perdre, ici, ses privilèges et ses illusions.
On expérimente que conflit ne veut pas dire violence
On peut comprendre ainsi que sur la scène du monde violence doive se muer en conflits.
Il ne s'agit pas seulement d’avoir compris, il s'agit de savoir le faire et le vivre.
En résumé, l'atelier théâtre doit être :
Le creuset d'une parole plurielle,
Une expérience humaine non renouvelable.
Non renouvelable parce qu'unique, parce que cette expérience est faite avec un collectif de personnes qui est celui-ci à un moment donné dans un lieu donné.
Le spectacle:
Faire un atelier qui débouche sur un spectacle, c'est avant tout l'idée de partage, de solidarité:
Se montrer aux copains différents.
Avoir peur et pouvoir le dépasser car les autres comptent sur moi.
Avoir du plaisir dans l'altérité
Le spectateur:
Donner à voir du théâtre aux élèves c'est :
Donner à voir de l'inconnu pour renouveler les modes et les contenus de pensée
Donner à voir du connu pour reconnaître l'inconnu.
Repérer le jeu des autres, c'est repérer le sien.
Animer une parole critique sur le spectacle c'est animer une parole critique sur le monde.
Le statut
De plus en plus l'intervenant théâtre est soumis aux contraintes institutionnelles et aux valeurs du travail social : élèves difficiles, problèmes familiaux ou autres. Alors que le travailleur social est professionnalisé, permanent et hautement structuré, l'intervenant théâtre lui reste un vacataire sans statut au mieux un intermittent du spectacle, un chômeur donc.
Sa fonction reste plus qu'oubliée, et son statut reste illégal puisque intermittent il ne peut être payé par l'éducation nationale.
La contradiction est au coeur même de sa fonction et de sa pratique :
Suis-je artiste où prof de théâtre, est-ce que l'art peut être une Pratique que l'on acquiert, où est ce le chemin à l'art qu'on indique.
Place de la compagnie dans la Cité :
Elle est la tête de la pieuvre de ma dernière recherche artistique :
Elle irradie sur le village, tout ce qui est le contenu, les objectifs de compagnie : Développer une pratique sociale citoyenne du théâtre.
A partir de là la compagnie facilite le travail fait à l'école. Que ce soit au niveau de la communication ou de l'échange avec la cité (...)»
(Joelle RIVENALE)
Et l’élève qui fait du théâtre?
«" L'enfant théâtreux" (notre E.T. à nous) est avant tout "un". Il n'a souvent cure du groupe. Il est là souvent pour que l'on s'occupe bien de lui, qu'on le regarde, le choie, l'aime, le valorise. "L'enfant théâtreux" est un germe de comédien individualiste à tout crin. "L'enfant théâtreux" s'inscrit en atelier de pratique artistique “théâtre” pour faire du théâtre! Que s'imagine-il? Le plus souvent qu'il va apprendre un texte "par cœur" et le récitera dans "le ton" en faisant "les bons gestes". A moi bien sur, de l'entrainer dans un autre univers.
Pour que "l'enfant théâtreux" entre directement dans une vraie problématique de comédien il faut immédiatement lui faire faire du théâtre, tel qu'il se l'imagine. Alors je lui dis: "Fais moi du théâtre". Souvent je suis très surpris des résultats. Après un moment d'hésitation, il y a comme une urgence à me montrer tout ce qu'il s'imagine être le théâtre. Oui, le corps est mal investi. Oui, l'imagination est absente du rendez-vous. Mais il me semble plus important, dans cette première rencontre, que "l'enfant théâtreux" reparte de l'atelier avec une conviction partagée, à savoir : “J'ai fait du théâtre!"
Durant tous mes ateliers de pratique artistique, j'essaye d'inculquer aux élèves que le théâtre est avant tout un art, que ce n'est ni une "pratique", ni une "technique", encore moins un "médicament" pour se soigner d'une quelconque timidité ou d'un manque de confiance en soi. Il me semble très important de donner cette dimension artistique liée immédiatement à l'engagement de soi.
Et où répétons nous? Dans quels lieux? : 1'école! Partout dans l'école. Une salle de classe, la cantine, le C.D.I., la cour, le préau, ou dans plus de confort : un foyer rural, une salle aménagée. Un atelier de pratique artistique doit vivre ses contraintes. "L'enfant théâtreux" ne comprendra le subversif de l'art dramatique en milieu scolaire que s'il le pratique dans son lieu. Ce lieu, torturé par la création, lui permettra alors d'avoir une nouvelle approche de son école. Le théâtre à 1'école est avant tout révolutionnaire.
C'est vrai aussi que lorsque j'anime un atelier de pratique artistique, j'emmène toujours les élèves une semaine ailleurs. C'est une des conditions sine qua non de mon projet.
Nous partons ensemble, dans un lieu convivial. Là, nous apprenons à vivre les affres et les joies de ce que peut être ceux d'une compagnie en tournée. C'est dans ces moments là que nous explorons d'autres dimensions : l'affectif bien sur, mais aussi la fabrication des costumes, le maquillage, la vie en commun. (...)
(Frédéric FLAHAUT - le 10 juin1998).
Et pour suspendre et non conclure voici le point de vue d’une enseignante qui s’acharne à défendre naïvement l’intervention de l’artiste à l’école et l’introduction du théâtre comme art et non outil .
"À un moment où l'on s'interroge sur le choix des politiques à développer culturelle ? et/ou artistique ?
à un moment où le Ministère de la Culture a choisi l’ élargissement des partenariats avec d'autres ministères
à un moment où l'on parle de plus en plus de patrimoine culturel, d'activités, d'occupation, d animation
et à un moment où l'Education Nationale et les collectivités s'engagent dans les rythmes scolaires ou dans d’autres actions comme les rencontres de lycées ou de collèges sans prendre en compte les expériences des 15 ans de partenariat de l’Education Nationale avec les artistes.
Il me semble important d'affirmer ici que la présence de l'artiste reste irremplaçable à l'école et dès le plus jeune âge et d'essayer de comprendre la spécificité de son apport.
L'élargissement de la politique actuelle ne devraient pas faire naître de nouveaux métiers “les médiateurs”. Pourquoi créer de nouveaux intermédiaires, des interfaces sans ancrage, sans appartenance à un univers spécifique, qui seul permet de fonder parole et démarche; ne suffirait-il pas de former (formation initiale et continue) à l'action artistique et culturelle les artistes, les médiateurs déjà en place, les enseignants de la maternelle à l'université, les animateurs de loisirs, de quartiers, les directeurs même de salles de théâtre, les diffuseurs, les relations publiques, les acteurs, pour qu'ils puissent faciliter la rencontre, le lien entre la cité et l'art, en particulier le théâtre (un projet de société quoi ?).
Mon expérience de compagnonnage avec des artistes de théâtre m'incite à dire que toute politique d'éducation doit être artistique et culturelle, elle doit permettre une démarche créatrice, expérience essentielle et fondatrice du sujet.
Bien sûr l'artiste à l'école fait découvrir le théâtre, cet acte si archaïque de représenter le monde par des hommes devant d'autres hommes, monde qu'il poétise, qu'il représente métaphoriquement est une dimension essentielle, à notre époque du virtuel.
L'artiste à l'école permet d'expérimenter un processus qui met en relation le monde et l'intime,
un art de faire; gratuit en ce sens qu'il ne sert à rien, sinon d'art de faire.
- Il est celui qui donne accès à l'intime, qui permet ce risque car il met au centre une démarche nourrie de sa singularité, de failles et qui permet d'aller des formes, des règles de fabrication artisanale jusqu'aux désirs subjectifs.
Il s'agit d'écouter mais aussi de partager sa vision du monde par rapport à une sensibilité de rencontrer une subjectivité pour comprendre d'autres subjectivités. A travers l'acceptation d'une forme, d'une langue, c'est peut-être la reconnaissance de l'artiste mais plus globalement la reconnaissance de l'autre qui est en jeu.
L'artiste donne des règles, exige une rigueur, il peut apporter aux élèves qu'il rencontre l'envie de s'en sortir, de construire sur leurs faiblesses, leur irréductibilité, leur révolte, leurs aspirations, leur souffrance même; faire de leur vie une oeuvre, devenir artiste de sa propre vie, trouver son itinéraire personnel mais en relation avec les autres. A un moment où le sujet est mis à mal par la déconstruction, la crise, la réponse artistique est un des derniers lieux où l'humain peut se fonder.
Il ne s'agit plus d'accumulation ni de comblement mais d'apprendre à vivre et de retrouver le sens de la vie quand l'économique fait aussi défaut c'est urgent.
L'expérience de la création fait aussi apprendre le deuil, le détachement avec l’œuvre et toutes les phases de création ne sont-elles pas comparables à celles qu'un sujet traverse pour advenir ?
Lors des rencontres précédentes du GRETE j'ai retenu quelques points de vue d'artiste sur leurs relations à l'école.
Catherine Marnas à Gap disait qu'elle donnait le droit de rêver
que le théâtre est le lieu où l'on peut dire que ça peut être autrement.
Hubert Colas à Marseille parlait de mettre en éveil, en état de conscience du monde les élèves qu'il rencontrait et surtout en choisissant la poésie comme forme d'expression fondamentale de sa présence au monde, partager cette façon d'être dans une société qui rejette toute forme de poésie et affirmer ce regard différent et être impliqué dans ce regard là, le transmettre c'était là l'irremplaçable de l'artiste.
Françoise Châtot insistait sur la rigueur, que tout théâtre est initiateur et si les élèves comprennent qu'il faut passer un certain nombre d'épreuves, ils ont atteint un seuil de sensibilité à ce que peut être un travail de création et c'est soudain l'éveil de créativité dans une structure une esthétique avec une exigence sans oublier la Culture et là l'artiste a un rôle nécessaire et irréductible disait-elle.
Nous sommes à un carrefour, quel choix, pour quelle société ?
Le modèle français des années 80 fait appel à l'artiste. Il commence à se diffuser en Europe.
Ce modèle spécifique correspond bien à un pays où les droits de l'individu et de la nation sont liés, s'il s'agit de faire appel à ce que chaque personne a de singulier pour fonder l'altérité et le respect de l'autre. L'artiste naturellement est celui qui sait le mieux structurer et rendre partageable ce qu'il y a de plus intime.
Si on s' orientait seulement vers une éducation plutôt culturelle et en relation avec, médiateur, animateur, pour partager le patrimoine commun et développer les potentialités des individus dans ce qui leur est commun, ne risque-t-on pas de faire un choix dangereux qui ferait passer du droit de l'individu à celui de communauté, des communautés et au delà à celui des ghettos, de libanisation; la ressemblance ne conduit-elle pas à l'exclusion de l'autre différent ?
Optons de fonder l'altérité en apprenant que l'autre est différent de moi et que le respect de chacun est fondé sur cette différence irréductible.
A l'heure Européenne la France doit affirmer sa conception particulière du citoyen et de l’État-Nation et choisir une éducation artistique et culturelle et avec l'artiste au centre du dispositif .Fonder les droits de la communauté aboutirait à des partitions sanglantes.
Enfin j'ose encore rêver d'une politique non pas de médiation mais de l'artiste dans la cité où il ne serait plus l'artiste employé voire parcellisé dans des interventions lors du passage en résidence mais bien l'artiste responsable avec une troupe, des lieux d'expérimentation, avec les jeunes, des écoles, des quartiers où le sens pourrait être au centre et non plus une politique marchande de diffusion des œuvres.
La culture, l'art ne doivent jamais devenir une marchandise"
Mireille GRANGE.
Un colloque sur l'apport de l'artiste a poursuivi le questionnement.